les gaines de haches

Pour illustrer le Néolithique, on évoque toujours les lames de haches et d’herminettes en silex ou en roche tenace. En fait, à de rares exceptions près, les parties imputrescibles de l’outil sont les seules qui nous parviennent. En général, la lame mais aussi, le cas échéant, la gaine en bois de cerf qui sert d’intermédiaire pour l’emmanchement.

Les haches néolithiques sont donc surtout connues par leur lame, à tel point que celle-ci est souvent appelée « hache ». 

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Les trois composants de la hache (manche, gaine et lame polie) forment un assemblage où les modifications d’une partie peuvent  se répercuter sur les autres. L’étude des seules lames polies ne suffit pas et on peut s’attarder sur d’autres aspects comme :

  • Les techniques de fixation de la lame (par le biais des gaines en bois de cerf),
  • L’incidence des formes et des dimensions des lames sur les modes d’emmanchement,
  • Les formes du manche, droit ou coudé par rapport à l’outil,
  • La position de la lame par rapport au manche (type hache ou type herminette),
  • Les traces d’emmanchement laissées sur les lames polies (lustrés, bouchardage…),
  • Les types d’assemblage entre le manche et la lame : soit la lame rentre dans le manche et ce dernier enserre la lame, soit la lame enserre le manche (lame percée ou gaine à douille),

Mais aussi du rôle de la gaine qui est double :

  • Elle permet d’utiliser des lames polies de petit format (gain de temps et réaffutage)
  • Elle joue un rôle d’amortisseur des chocs, évitant de briser le manche (qui est le plus long à réaliser)

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La gaine permet d’utiliser une lame polie de plus petite longueur de manière aussi efficace qu’une lame polie de longueur équivalente à celle de la lame et de la gaine.

Il est important de rappeler ici que la gestion de la matière première est un élément clé des Néolithiques. Ne retrouver que des petites lames sur un site ne signifie pas que les haches étaient petites, et que les hommes ne travaillaient que peu le bois ou ne coupaient que de petits troncs. Cela signifie surtout que la matière était réutilisée plus longuement, grâce aux gaines.

Le bois de cerf combine 2 qualités : la robustesse et la souplesse.

A l’extérieur, les parties les plus compactes de la ramure sont les andouillers et le merrain mais à l’intérieur, la partie spongieuse peut être creusée facilement après un long trempage du bois de cerf. La perforation pour l’emmanchement transversal se fera souvent dans les nœuds merrain-andouiller.

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Pour obtenir une gaine, la découpe du bois se fait par percussion (on entaille une gorge à l’aide d’un percuteur tout autour du bois) ou par sciage au silex. Ensuite vient le décorticage par entailles successives pour dégager le tenon de la gaine. L’étape suivante est l’évidage et la perforation pour enlever la partie spongieuse et enfin, il faut parfois polir la gaine aux extrémités pour en régulariser les fibres et renforcer la gaine.

Au nord-ouest des Alpes, six grands types d’assemblage sont reconnus :

  • Type 1 : La hache à long manche droit (60 à 80 cm) et à tête renforcée où une mortaise reçoit la lame polie, soit directement, soit avec une gaine,
  • Type 2 : L’herminette à manche court et épaissi, dont la gaine très allongée traverse la tête du manche,
  • Type 3 : La hache ou l’herminette à manche coudé plus ou moins long dont le coude présente un tenon bifide où vient s’insérer soit une lame, soit une gaine à tenon étroit et plat, soit une gaine bifide,
  • Type 4 : L’herminette à manche court et coudé avec un tenon qui reçoit une gaine à douille,
  • Type 5 : L’herminette à manche court et coudé qui présente un plan d’applique où est posée et ligaturée la lame,
  • Type 6 : Les outils avec lame percée traversée par un manche : coins, masses, hache-marteau ou haches dont la lame est insérée dans un bois de cerf percé.

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Toutes ces gaines apparaissent au Néolithique Moyen (vers 4200 BC), sans jamais se substituer complètement aux emmanchements directs. C’est à ce moment là qu’on utilise des lames de plus petites dimensions que l’on recycle régulièrement.

Au Néolithique Final, l’apparition du système de manche coudé à pinces (type 3) arrive en même temps que la maîtrise de la métallurgie du cuivre qui produit de petites lames plates. Le succès du manche coudé avec pinces perdurera jusqu’à l’Age du Bronze final, où apparaissent les lames de hache à douille emmanchées dans un manche coudé avec un tenon.

Au final, on distingue au moins 8 types de gaines de haches :

  • Les gaines perforées sont caractéristiques de la culture de Seine-Oise-Marne et bien attestées dans le Jura et conviennent aux haches comme aux herminettes.
  • Les gaines perforantes
  • Les gaines simples sans couronne
  • Les gaines à couronne cylindrique ou tronconique
  • Les gaines à couronne renforcée d’un ergot.
  • Les gaines à couronne renforcée d’une ailette
  • Les gaines à douille sont utilisées le plus souvent pour des herminettes sur manche coudé. C’est l’outil idéal pour creuser une mortaise.
  • Les gaines à tenon bifide est une évolution des gaines à douilles. Elles sont caractéristiques du Néolithique Final.

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Une particularité des gaines perforées et qu’elles sont très présentes comme dépôt dans les sépultures collectives. Certaines sont même façonnées avec un grand soin, polies et sculptées en forme de bouton sur l’extrémité marteau. Il s’agit dans ce cas d’imitations des lames de hache-marteau en pierre polie dont la douille destinée à recevoir la lame de pierre peut être transformée en extrémité de forme convexe, comme un tranchant, mais largement arrondie et polie.

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Les rares exemplaires connus de ces hache-marteau polies et sculptées en bois de cerf démontrent la forte valeur de représentation dont elles sont investies. A Chalain, une gaine perforée parfaitement polie est sculptée pour suggérer les perlures du bois de cerf et des ligatures pour son emmanchement.

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